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Libération
Critique

Quelques mots depuis le Vel’ d’Hiv

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Un recueil de dix-huit lettres témoigne de la rafle des 16 et 17 juillet 1942, qui avait conduit 12 884 Juifs aux portes de l’enfer.
publié le 23 avril 2011 à 0h00

Que reste-t-il de mémoire vive sur la rafle du Vélodrome d’Hiver ? Vu la somme de publications historiques, d’œuvres de fiction littéraires et cinématographiques décrivant la plus grande rafle jamais menée contre les Juifs, la question semble obsolète. Pourtant, en dehors d’une unique photo (1), de quelques lettres et documents attestant de l’arrestation de 12 884 Juifs à Paris et dans ses environs les 16 et 17 juillet 1942, peu de traces témoignent de la tragédie, la censure de la presse ayant bien fonctionné.

Remplir les pages encore blanches de ce sombre épisode est la première vertu de Je vous écris du Vel' d'Hiv, un recueil de 18 lettres préfacées par la journaliste, écrivain et scénariste Tatiana de Rosnay (2). Miraculeusement rescapées par le biais de collectes clandestines, et jusqu'alors conservées au Mémorial de la Shoah, ces lettres sont regroupées pour la première fois. Des tranches de survie à l'épreuve de l'extrême, griffonnées dans l'urgence par 14 victimes enfermées dans le stade du Vel' d'Hiv. «Il est 4 heures du matin. Ils sont venus nous chercher», raconte Edith à son camarade de classe. Plus tard, lapidaire : «Roland, apporte Vélodrome d'Hiver colis avec gâteaux fruits cigarettes Launay Souza.»

Je vous écris du Vel' d'Hiv dit la faim, l'attente, la «pagaille», la promiscuité liée aux «arrivages» massifs, les maladies, tout l'enfer déshumanisant du confinement. «Nous sommes très malheureux. A chaque i