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Libération

L’Europe errante

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Le cahier Livres de Libédossier
Rencontre avec Peter Handke
publié le 16 juin 2011 à 0h00

A quoi reconnaît-on le rythme d'un grand livre ? Aux ralentissements et détours qu'il impose. L'auteur s'arrête, bifurque, découvre ce qu'il n'attendait pas. Il met tout sur la page, la découverte et l'état du découvreur, «comme s'il fallait envoyer un beau moment à quelqu'un comme prière». Prière est un mot fréquent dans les livres de Peter Handke, dans ses paroles aussi. Qui dit prière, dit pélerinage. La Nuit Morave en est un. Il poursuit la ballade métaphysique et politique entreprise dans Mon année dans la baie de personne et la Perte de l'image.

Le voyage romanesque se déroule de Serbie en Adriatique, de Castille en Galice, du Kosovo en Autriche, bref, dans la Vieille Europe. En Carinthie, province natale de Handke, on suit un colloque international de joueurs de guimbardes : «Qui attaquerait, ferait entendre en premier sa guimbarde ? Tout de même pas ces deux Autrichiens avec leurs costumes traditionnels marron et les boutons de corne de cerf en forme de tête de mort au revers ? Mais pourquoi pas ?» Des points d'interrogation ferment souvent les phrases de Handke. Ce sont des points de sourire ou, plus souvent, d'attente.

«Muet». A Soria, on participe à «un symposium sur le bruit», en compagnie de quelques hommes qui ne supportent plus que les leurs. Handke lui-même est exaspéré par les bruits, à commencer par celui que fait sa propre voix quand il vous parle. Il la critique sans cesse - le ton, le r