Est-ce un signe nostalgique de son épopée révolutionnaire sud-américaine ? Ou une adresse commerciale inspirée par le succès d'Indignez-vous de Stéphane Hessel ? «Armez-vous», a fait écrire Regis Debray sur une bande de papier fin encerclant son nouvel ouvrage consacré au «bon usage des catastrophes». Un impératif guerrier pour donner le ton de ce «petit manuel d'apprentissage» écrit à l'intention de ceux qui veulent mieux vivre et penser dans nos sociétés du risque.

Déjà, dans son précédent livre manifeste (Eloge des frontières), Debray l'éclaireur s'était tourné vers le Japon, admiratif des mille et une frontières physiques, symboliques, rituelles ou spirituelles - ce subtil art du passage - que ce peuple de l'Extrême-Orient semble avoir cultivées comme aucun autre. Il y dénonçait, en contrechamp, qu'en ces temps mondialisés, ce qui compte se veut et se dit chez nous, «sans frontières». Le thème, depuis, a fait florès, et comme par un retour de balancier, de nouveaux prophètes annoncent la «démondialisation», le retour du protectionnisme, la priorité du local sur le global.

C'est encore le Japon qui sert de détonateur et de contrepoint dans cette nouvelle démonstration de l'essayiste, qui frotte les maux et les symptômes de notre époque aux grands récits spirituels fondateurs de notre histoire. A travers l'exemple du Japon et de cette double catastrophe du tsunami et de la centrale nucléaire de Fukushima, Debray