On est en 1984, non pas en Estasia, mais au Japon. Deux vies solitaires défilent, pendant six mois, l’une allant vers la mort, l’autre vers la fiction : elles se reflètent et s’appellent, un troisième tome en 2012 nous dira jusqu’où.
D'une part, Aomamé, jeune masseuse prodigieuse, levant dans des bars des quinquagénaires légèrement chauves qui lui rappellent Sean Connery. Aomamé est liée à une vieille dame richissime et d'une impitoyable délicatesse qui reçoit dans une serre, comme le général Sternwood dans le Grand Sommeil. Son garde du corps est un pédé invincible et discret. Elle propose à Aomamé des contrats payés en liquide : tuer des hommes qui martyrisent leurs femmes. Aomamé agit sans scrupules, en héroïne de manga, avec une fine aiguille d'acier.
D'autre part, Tengo, jeune écrivain qui n'a publié aucun livre et à qui son éditeur, un type qui appelle toujours la nuit, propose de récrire la Chrysalide de l'air, premier roman autobiographique d'une jeune femme de 17 ans. Le livre devient un best-seller. Il raconte l'histoire d'une fillette vivant dans une secte et qu'on punit pour avoir laissé mourir une chèvre aveugle. Il semblerait que l'auteure sorte, elle aussi, d'une secte fameuse, l'Aube, qu'elle a peut-être fuie. Raconte-t-elle son histoire ? Elle ne le dit pas. Si elle récite des passages entiers de poèmes médiévaux japonais, elle est plutôt elliptique. Parallèlement, Aomamé est chargée par sa vénérable commanditaire de