En 1938, Ranuccio Bianchi Bandinelli, professeur d'art antique et d'archéologie, est sommé par son gouvernement d'accompagner Hitler et son état-major dans la visite de quelques jours qu'il doit effectuer à Rome et à Florence pour découvrir les musées et chefs-d'œuvre italiens. Homme de culture, spectateur attentif mais quelque peu désabusé de la situation mondiale - et qui reconnaît volontiers sa lâcheté face aux bouleversements en cours -, Bandinelli accepte la mission «par curiosité» et va noter dans son journal les détails de cette étonnante rencontre avec des dictateurs au sommet de leur gloire.
Il en ressort un portrait au vitriol des deux hommes, individus assez médiocres, relativement incultes, accumulant les poncifs sur la peinture et l'art. Mussolini «a une démarche de pantin, qu'il ponctue de ronds de cou et de hochements de tête obliques comme pour atténuer son aspect massif, mais le résultat est aussi gauche que sinistre». Quant à Hitler, «à première vue, il est moins repoussant. Une mise digne, soignée, presque modeste. Frisant la servilité. Une personnalité à l'aspect subalterne, type contrôleur de tram…»
De temps en temps, au détour d'un commentaire ou d'une phrase banale, la folie de Hitler ou de Mussolini apparaît soudain, effrayante et brutale, comme dans ce passage où le Führer, détaillant les caractéristiques architecturales du Colisée, songe à de nouveaux bâtiments à bâtir en Allemagne, «mais en granit», seul matériau c