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Libération
Critique

Honorer son traître

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Le cahier Livres de Libédossier
Dans son cinquième roman, Sorj Chalandon se glisse dans la peau de son père de substitution, membre de l’IRA et agent double.
publié le 16 septembre 2011 à 0h00

Comment un grand reporter de sa génération devient écrivain, ce n'est pas simple à raconter. Retour à Killybegs, cinquième roman de Sorj Chalandon, permet toutefois de le comprendre, dans la mesure où c'est un aboutissement de l'itinéraire de son auteur.

Orphelin. Sorj Chalandon, longtemps journaliste à Libération, aujourd'hui au Canard enchaîné, a reçu en 1988 le prix Albert-Londres pour sa couverture du procès de Klaus Barbie et ses reportages sur le conflit d'Irlande du Nord. Il avait 35 ans et vivait cette histoire depuis longtemps. Certains chefs de l'IRA étaient ses amis. Leur cause était devenue la sienne. Il avait fait de l'Irlande son pays de cœur et de lutte. L'engagement pour les humiliés, les victimes, les humbles, est la valeur qui a fait de lui un reporter. Chacun de ses romans explore et chante à son tour, d'une manière ou d'une autre, cette valeur. On y trouve des enfants battus, des pauvres, des résistants, des héros, et, naturellement, des traîtres.

Retour à Killybegs reprend autrement l'histoire du précédent roman, Mon traître. Sorj Chalandon contait comment Antoine, luthier et «petit Français», découvre et vit la trahison de celui qui fut pour lui, depuis sa jeunesse, un héros et un père de substitution : Tyrone Meehan, membre de l'état-major de l'IRA, haut responsable de Sinn Fein, révélant un jour qu'il travaillait depuis vingt ans pour les services britanniques. L'auteur s'inspirait d