Limoges. C'est facile de se moquer. Ville au vilain nom de province, parangon de la mort lente (alors que personne n'y est jamais allé, mais c'est dans l'imaginaire français), qui commence comme limoger et limon, rime avec «lit moche». Un endroit où sont amis depuis quinze ans deux poètes de merde, c'est eux qui le disent, pas nous : Sylvain Courtoux (né en 1976) et Jérôme Bertin (pas né en 1982). Un lieu où les éditions Al Dante ont naguère vécu. «Sylvain écrit son Still nox. Un bouquin sur sa vie merdique. Sur la came. Les bastons. Le suicide de sa maman. Et il m'a dit tiens. Si t'écrivais un texte jumeau. Et puis tiens. Toi qu'aime plus rien», annonce Jérôme. «Ton travail, quand tu écris, n'est pas au service d'une quelconque productivité m'a dit hier au téléphone mon ami Jérôme Bertin», note Courtoux.
Ratiocination. Bertin écrit une épopée du rance, cet état où l'on ne tire même pas parti de son aigreur pour faire rire. Bâtard du vide est une confiture de moisi âpre comme l'opium, un remugle de petitesse dont ne sort que le pire : «C'est beau un hôpital de jour. C'est plein de dessins d'art brut et d'affiches contre le cancer. On y est bien accueilli. Comme au sortir du con de sa mère.» Encore qu'au jeu du rien il n'est pas sûr que son compère Courtoux soit en retard avec Still nox, ratiocination geignarde et accusatrice d'un accro au célèbre somnifère victime d'un complot extraterrestre (l'équivalent