Jadis, le temps était clair. Dans le sens, au moins, d'une météorologie politique, sociale, historique, idéologique… Le monde semblait tourner rond, les sociétés étaient agitées par l'affrontement de grands blocs ou classes antagonistes, et de cette lutte tiraient leur dynamique, qui devait les conduire, après le grand soir, au règne de la paix, de la liberté et de la justice. Bref, l'histoire allait son train, les forces sociales, scientifiques ou techniques qui la faisaient avancer vers le Progrès étaient identifiables, intelligibles, et nul ne doutait que son cours ait un sens, une direction et une signification. Parfois, suivant la pensée de Giambattista Vico, on ajoutait un bémol et remarquait que le mouvement historique a des corsi et des ricorsi, avance et recule, connaît des périodes d'essor, mais aussi de brusques rechutes en barbarie. Mais cela ébréchait à peine la vision du monde dominante, selon laquelle le genre humain s'émanciperait, non sans mal ni douleurs, de toutes les aliénations et, tôt ou tard, vivrait dans le bonheur.
Explosions. Puis est venu le «court XXe siècle», selon l'expression d'Eric J. Hobsbawm, avec ses conflits mondiaux, ses génocides, ses fascismes et ses totalitarismes, ses guerres civiles, ses explosions nucléaires civiles et militaires, ses destructions de la nature… Aussi, l'enthousiasme miné, a-t-on peu à peu penché vers «une vision pessimiste de l'histoire mondiale, à l