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Libération

Rechetnikov et son hameau diable

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publié le 13 octobre 2011 à 0h00

«Le hameau de Podlipnaïa n'est pas beau.» C'est là son moindre défaut. Car la première phrase du roman - Ceux de Podlipnaïa est paru en Russie en 1864 - ouvre sur une noirceur si épouvantable qu'elle est presque comique. Leurs maisons sont pitoyables mais «ceux de Podlipnaïa» «trouvent leurs chenils fort habitables et n'ont pas l'ambition d'avoir des maisons saines et bien éclairées». L'hiver sibérien les massacre : «On pourrait les croire dans la léthargie : en effet, ils sont presque tous malades, malades de misère et de saleté. Ils restent couchés ou vautrés, maudissant en silence le travail qui les éreinte sans les nourrir, eux-mêmes et leur propre sort, et tout leur entourage. Les pauvres diables sont torturés par la faim ou la maladie. Dans le nombre, pourtant, se trouvent des adolescents, des jeunes filles qui, bien que laides, sont brûlées de passions que la souffrance rend encore plus féroces.» Ils se sont fait un dieu à leur image et prient devant «de véritables épouvantails».«Ce qui les ennuie fort, c'est qu'il faut toujours se rendre au village, soit pour se marier soit pour enterrer quelqu'un et que le pope exige toujours de l'argent.» Jeunes ou vieux sont pareillement pris dans le désastre. «Leurs enfants sont de petits animaux qui vivent ou meurent selon le caprice de la destinée. Les mères s'en occupent pourtant un peu.» Comment faire un roman avec ces gens quand on en est là au bout de même pas 1