Il y a sept ans, Craig Thompson (né en 1975) s'était posé comme une plume sur le manteau de neige de la BD indé avec Blankets, récit balsamique d'une adolescence religieuse et traumatique au fond de l'Amérique. Après quelques albums moins aperçus, Thompson livre avec Habibi («chéri» en français) un monument définitif et dynamique, une sorte de Mille et Une Nuits aux traits vigoureux et virevoltants, jamais en pause, directement inspirés de la calligraphie islamique, rempli de citations du Coran et de contes enchâssés. Cet attrait pour l'islam correspond chez Thompson à une sorte de réaction aux excès de l'après-11 Septembre dans son pays. Issu d'une famille bégueule, il a voulu élaborer un œcuménisme réparateur : «Le sentiment anti-islamique qui est apparu aux Etats-Unis ressemble surtout à une haine de soi-même, contre notre propre forme de fondamentalisme religieux.» Dodola est une jeune fille vendue par son père à un scribe, puis arrachée à celui-ci par des brigands qui la revendent à un sultan aussi cruel que bonasse, personnage comique de frustré sexuel acritique, se posant d'autant moins de questions qu'il s'ennuie auprès de son harem. Dodola attend un enfant de son souverain, mais ses souvenirs sont auprès de Zam, un orphelin qu'elle a recueilli quand elle avait 12 ans et élevé comme un frère.
Puis tout va de mal en pis pour l’héroïne, comme dans tout bon feuilleton populaire qui se respecte, mélangeant en proportion égales invraisem