Dans la Carte et le Territoire, Michel Houellebecq avait campé une France agricole et touristique peuplée de néoruraux écolos, défaite mais résignée, s'abandonnant à la mélancolie et offrant ses hôtels de charme et de passe aux touristes du monde entier. Le drame métaphysique du romancier se déroulait dans le décor de la fin de l'âge industriel, celui d'une France sans usines où les grands patrons n'étaient plus guère que des sujets de tableaux accrochés aux cimaises des musées, ultimes témoins d'anciens savoir-faire. La réalité n'a pas encore rejoint la fiction. Mais la France connaît depuis deux décennies un effondrement industriel, des fermetures à la chaîne et des destructions massives d'emplois, accélérées par la violence de la crise. Aucun de ses grands voisins européens ne connaît pareille saignée.
C'est cette mutation brutale et radicale, souvent vécue «comme une fatalité postmoderne» que décrivent et analysent un tandem talentueux, l'économiste Patrick Artus et la journaliste Marie-Paule Virard. Ils n'en sont pas à leur coup d'essai et avaient déjà raconté comment Le capitalisme est en train de s'autodétruire (La Découverte, 2007), emporté par des logiques financières déconnectées des réalités.
Le duo poursuit là sa grande explication des tremblements de terre économiques de ce début de siècle et sonne l'alarme à la veille de l'échéance présidentielle. Artus et Virard dénoncent l'illusion dangereuse du modèle «bipolaire» : la migrat