Nul n'en doute plus parmi les historiens, Léon Trotski fut, avec Lénine, l'autre grand protagoniste de la révolution russe d'octobre 1917. Voire le principal. Revenu à Saint-Pétersbourg de son exil américain dès avril 1917, il pousse à la prise du pouvoir. «Sans nous deux, la révolution n'aurait pas été ; la direction du Parti bolchevique aurait empêché son accomplissement», rappelait-il encore dans son journal en 1935, pourfendant l'attentisme de Zinoviev, Kamenev et Staline. Et Trotski avait déjà été, lors de la révolution de 1905, le héros du soviet de Saint-Pétersbourg.
Orateur enflammé, révolutionnaire visionnaire, implacable chef de guerre et grand écrivain - «parmi ses contemporains politiques, Churchill fut le seul à l'égaler» -, Trotski, de son vrai nom Lev Davidovitch Bronstein, a été négligé par les biographes. Les staliniens ont vomi leurs calomnies. Les sympathisants de sa cause, tel Isaac Deutscher, auteur d'une trilogie, ou des militants trotskistes comme l'historien Pierre Broué lui ont certes consacré des livres importants. «Mais l'un et l'autre ont occulté un grand nombre de questions délicates sur lesquelles il eut été cependant nécessaire de s'arrêter», souligne Robert Service, professeur d'Oxford qui se situe dans la mouvance d'une nouvelle génération d'historiens britanniques, tel Simon Sebag Montefiore, auteur d'un extraordinaire Staline, la cour du tsar rouge (Perrin).
L'ouverture des archives après la chute du Mur, l