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Libération
Critique

N’oubliez pas le guide

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Une excursion peu touristique à Haïti par Lyonel Trouillot
publié le 17 novembre 2011 à 0h00

Il aurait été beau que le fondateur d'Actes Sud, Hubert Nyssen, s'en aille sur un Goncourt, via la Belle Amour humaine. L'auteur haïtien Lyonel Trouillot faisait partie de la dernière sélection, sans doute avait-il très peu de chances en face d'Alexis Jenni et Carole Martinez. Il n'a pas eu davantage de succès côté Goncourt des lycéens. Pourtant, son roman est beaucoup plus subversif que les ouvrages primés. S'il avait eu le prix, Lyonel Trouillot aurait eu l'occasion de défendre quelques idées, et nul doute qu'il l'aurait fait sans démagogie.

Maître chanteur.La Belle Amour humaine se présente comme le monologue d'un guide de 35 ans, qui conduit une jeune fille jusqu'au lieudit côtier d'Anse-à-Fôleur, à six heures de route des bruits de la grande ville. La voix acerbe du guide cède la place de temps à autre au ton anonyme de la chronique. Il était une fois un colonel à la retraite, ancien chef de la police politique, et un homme d'affaires maître chanteur, l'un noir, l'autre mulâtre, tous deux atrocement cruels. Ils s'étaient fait construire deux résidences secondaires identiques, «Les Belles Jumelles». Une nuit, les maisons ont brûlé, les deux hommes avec. Le chef de section, un des personnages d'Anse-à-Fôleur, a prévenu les autorités du drame qui venait de se produire («Si drame il y eut.») On n'a jamais su ce qui s'était passé, et ce n'est pas l'enquêteur dépêché par la capitale qui put y voir clair. Le peintre aveugle, autre fig