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Libération
Critique

Chine. Une éducation à la baguette

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publié le 19 novembre 2011 à 0h00

Qu'en dirait Françoise Dolto ? Amy Chua, prof à Yale et fille d'immigrés chinois aux Etats-Unis, est une «mère Tigre». Son bréviaire, c'est l'éducation traditionnelle chinoise, et son modèle la fabrique de virtuoses et de forts en maths qu'est devenue la Chine. Persuadée du proverbe que «la prospérité ne dure jamais trois générations», elle élève ses filles à la baguette. Humiliations, insultes, mensonges, menaces, châtiments, tous les moyens sont bons pour que l'enfant, dont la principale qualité doit être l'obéissance, rafle tous les prix d'excellence. A l'école, au piano, en sport, en jardinage : «Si l'enfant n'est pas le meilleur, c'est qu'il n'a pas assez travaillé.» Pas de résultats, pas de jouets, télé, ni pyjama party… La vie de Sophia et Louisa est un champ de courses et leur coach de mère s'épuise à la tâche.

Trois cents pages de ce manuel d'éducation pourraient paraître soûlantes, si l'auteure ne finissait pas par se prendre en pleine face la rage de sa fille cadette. Contrairement à sa sœur, Louisa refuse de descendre les poubelles, promener les chiens et de jouer Mendelssohn au violon plus de trois heures par jour. Dans un restaurant moscovite, scène réjouissante, elle recrache le caviar que sa mère la force à avaler en la traitant de sauvage : «Je te déteste, je hais le violon, je ne veux pas être chinoise !» hurle l'adolescente. L'univers d'Amy s'écroule. Sa fille rebelle a été corrompue par le modèle américain, synonyme de laxisme : «Les