Dans son refuge d'Höganäs, port plaisancier embossé dans le sud-ouest de la Suède, Christer Strömholm (1918-2002) évoquait Paris entre deux glaces au nougat. Les puces de Clignancourt, qui ressemblaient alors à «un grenier surréaliste». Edgar Degas, «l'art de la pose». Wols, «prince-clochard», selon Sartre, croisé à Montparnasse. Et, bien sûr, le boulevard Rochechouart, entre les stations de métro Anvers et Blanche, où, chaque Noël, se calait la fête foraine, ses pommes d'amour, ses attractions pour gobeurs, les boxeurs coléreux, la charmeuse de serpents ou la femme léopard, tachetée à souhait. Strömholm s'installa dans le quartier du Moulin rouge en 1959, à l'hôtel. Et s'attacha à celles que la police malmenait, les prostituées, qu'il photographia sans goût du spectacle, mais avec une certaine ardeur.
Les Amies de la place Blanche sortit en 1983, uniquement vendu en Suède : 2 000 exemplaires rapidement épuisés. Dans la préface, Strömholm y racontait la solitude de «ces femmes nées biologiquement hommes», ces transsexuelles, un temps baptisées «les hormonées»,qui «réclamaient le droit d'être elles-mêmes, de ne pas être obligées de nier ou de refouler leurs sentiments […]». A leur contact, confiait-il plus tard au magazine Picture Show, il avait appris la tolérance.
Grâce à son fils Joakim qui perpétue la mémoire de ce père indocile, paraît aujourd'hui une nouvelle édition, inspirée de celle, originale, pub