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Libération
Critique

Vietminh de plomb

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Les souvenirs d’une famille racontés par un ado avachi et déraciné
publié le 26 janvier 2012 à 0h00

Gia Bao Tran a remisé dans un carton le bouquin que son père lui avait offert sur la guerre du Vietnam. Il refuse de porter la tenue traditionnelle, et c’est limite s’il ne se moque pas de l’accent de sa mère. Lui est né en Caroline du Sud, quand tout le reste de sa famille a vu le jour au Vietnam. Adolescent avachi dans une banlieue américaine, «GB» n’a que faire de savoir d’où il vient.

Toute sa vie, il a entendu : «Tu ne comprendras jamais.» Entre sa propre nonchalance et les non-dits parentaux, qu'il s'intéresse à la destinée de sa famille était inespéré. Quand, à 30 ans, il s'envole pour la première fois pour le Vietnam, c'est parce que sa grand-mère vient de mourir. 30 ans, c'est l'âge qu'avait son père quand il a fui son pays, en plein chaos, pour un exil forcé aux Etats-Unis. C'était en 1975, les Américains se retiraient du conflit, laissant le pays aux mains du Vietcong. Lui, GB Tran, le New-Yorkais, auteur et illustrateur, aurait-il pris une telle décision ? Tout perdre ? Aurait-il su protéger les siens ?

Ce parallèle de l'âge agit comme un déclencheur chez le jeune homme, qui va promener son crâne rasé à travers le vacarme, les moustiques et l'humidité du Vietnam pour reconstituer un semblant de continuité dans les mémoires familiales, déployées en images et en bulles dans Vietnamerica. Un pays-valise pour intituler cette véritable saga, qui oscille entre introspection autobiographique et histoire gigantesque. Car la famille de GB Tran est une fami