En 1519, l'Espagnol Hernán Cortés et sa petite troupe de conquistadors pénètrent dans Mexico. Quelques mois plus tard, en 1520, le Portugais Tomé Pires arrive à Nankin puis à Pékin, rencontrant l'empereur de Chine Zhengde. Cette proximité chronologique fascine Serge Gruzinski. Il voit en effet dans ces deux événements une même dynamique irréversible, le signe d'une première mondialisation qu'il définit comme «la prolifération de toutes sortes de liens entre des parties du monde qui, jusque-là, s'ignoraient ou se traitaient de fort loin». De ces liens nouveaux, objets d'une «histoire connectée» chère à l'auteur, il s'agit d'établir le contenu, d'en comprendre les significations en s'efforçant d'écrire une histoire à parts égales.
Si ces deux rencontres américaine et asiatique s’inscrivent dans une même vision universelle du monde, ce qui leur confère, malgré les apparences, de vraies similitudes, elles présentent aussi beaucoup de différences. L’auteur joue d’un bout à l’autre du livre sur cette mise en regard. Avant la conquête du Mexique, les Amérindiens ignorent tout des Espagnols et réciproquement, l’Amérique étant d’abord pour ces derniers un obstacle dans leur course vers l’Orient. Il en va tout autrement avec la Chine, pays qui fascine les Européens depuis les récits de Marco Polo. Les objets précieux venus de Chine sont connus sur les rives du Tage bien avant que Tomé Pires ne visite Pékin. C’est, en particulier, le cas des livres, très appréciés dans