C'est sur la fragilité. La grâce. Les seins des femmes. Et «Rodgeur Fédérère», comme ça se prononce.
Fédérère est tennisman, le narrateur est motard (en plus de journaliste sportif). Il fait la route, souvent dans sa tête, parfois entre Bâle et Bamako, du bitume jusqu'aux ornières propres à l'entorse. Trajets rêvés, cérébraux ou adhérant à une quelconque géophysique, peu importe, le titre annonce la couleur : Je suis une aventure, «je» s'écrit en avançant et vice versa. Les aventures ont parfois une fin, ici elles n'ont qu'une suite. D'autant que celles du héros se décalquent sur celles que Robert Pirsig a racontées en 1974 dans son Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, livre fétiche où l'on apprend que savourer l'instant consiste à ménager sa monture : en l'occurrence, faire survivre la mécanique de sa mobylette. On peut lire aussi l'Homme-dé de Luke Rhinehart.
Courts-circuits. Ce qui frappe d'entrée dans ce premier roman de Bertina depuis Ma solitude s'appelle Brando (2008), c'est le remue-ménage stylistique, le point de déséquilibre trouvé pour raconter l'aujourd'hui sans être trappé par le blanc du tout-venant ni arc-bouter la syntaxe en se touchant. Un truc en roue libre : «Bâle à sept heures du matin : 31 degrés Celsius. La Suisse est une arnaque, me suis-je dit en ruminant une mauvaise humeur épaisse comme une meule de gruyère.» Ecriture de raccourcis et courts-circuits dès la première phrase, le