D'emblée, il faut dissiper un fâcheux malentendu : Matthieu Pigasse, le banquier d'affaires le plus rock de la place n'a pas voulu, ou n'a pas pu, déballer tous ses secrets. Dans son nouvel opus de 238 pages, pas une ligne, pas un mot, pas même une confidence sur son rôle dans les négociations financières européennes au plus fort de la crise. Ce spécialiste de la dette souveraine, conseil du gouvernement grec pour le compte de la Banque Lazard qu'il codirige, doit pourtant en savoir long sur chacun des dirigeants européens, sur le flip des grands banquiers, sur l'avidité des marchés, sur ces heures électriques où l'euro a failli imploser. Au journal de bord, Matthieu Pigasse a préféré l'interpellation. Quitte à jouer les Cassandre. Sur le navire, il veut être celui qui actionne la sirène d'alarme. On croyait à l'accalmie, lui voit revenir la catastrophe. Ici, là, maintenant, juste devant nous. «L'Europe est en perdition.» Il s'agit ni plus ni moins de tenter «d'en sortir vivant».
Les passagers que nous sommes ne regardent pas dans la bonne direction : la mère des crises n'est pas celle de la finance, mais celle de l'Europe. Une crise économique, politique, morale, globale. Notre modèle de croissance est cassé : 2007 n'est pas une année noire, mais une année de grande bascule et de révolutions. Les «émergents» sont devenus des «émergés». Pour longtemps.
Après cinq siècles de domination, l'Europe semble vouée au destin des «immergés».