La «chaise allemande», c'est l'une des plus abominables tortures jamais imaginées. Elle permet de tordre le corps du supplicié jusqu'à son point de rupture, le laissant brisé, broyé, disloqué, parfois handicapé à vie. C'est une des «spécialités», parmi une quarantaine d'autres, des services secrets syriens et Dominique Eddé ne pouvait manquer de l'évoquer au détour d'une page de ce roman hanté par les ombres épaisses de ceux qui tourmentent et par celles, errantes, fugitives, blessées, des tourmentés. De Bahreïn à Rabat, en passant par Riyad, Djibouti, Le Caire ou Alger, les moukhabarats (police politique), comme on les appelle le plus souvent, mais aussi dotés de bien d'autres noms, sont omniprésents dans le monde arabe, dont ils sont la part la plus noire. Est-ce à cause de la terreur qu'ils inspirent ? Ils sont largement ignorés par la littérature arabe, y compris celle de l'exil, alors que leurs agissements pourraient fournir la trame de mille et une histoires. Quelques exceptions, comme l'extraordinaire la Coquille (Actes Sud, 2007) de Moustapha Khalifé, qui raconte l'effrayante plongée d'un opposant chrétien dans l'univers concentrationnaire syrien, pour son malheur peuplé d'islamistes. Ces moukhabarats, Dominique Eddé, qui est née au Liban, un pays qui est pour eux comme leur arrière-boutique, a choisi de les faire vivre à travers l'histoire de la famille Jann, des sunnites, dont une partie a fait allégeance à un certain «Président T.Z.» dans lequel on reconn
Critique
Atrides en Syrie
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publié le 29 mars 2012 à 0h00
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