L'un cabriole, l'autre marche au trot. Les deux livres n'ont pas le même tempérament ni le même format, mais ils s'attellent à une même ambition : faire vivre en bande dessinée l'amour des arts et du débat, donner à la malice du chevalier de Saint-George ou à l'opium de Jean Lorrain un corps plus plastique qu'on ne l'aurait cru. Catel Muller (accompagnée de Jean-Louis Bocquet) et Catherine Meurisse risquent presque en même temps deux albums graphiques pleins d'érudition souriante, l'un volumineux (Olympe de Gouges), qui se lit comme un feuilleton et l'autre, plus mince et comique (le Pont des arts), qui se gobe comme une série de shots colorés.
Humble passeur. Avec ces deux-là, on a le meilleur de ce que la BD peut faire à la culture dite «savante». Non pas en récupérer le cadavre pour le maquiller comme un camion volé (on pense aux douloureuses tentatives de porter Molière en vignettes) mais entrer au pays des idées en se faisant humble passeur. Pour cela, mettre en scène une figure d'intercesseur est toujours efficace. C'est évidemment Olympe de Gouges chez Catel & Bocquet, femme de lettres et de tête dont l'œuvre et les rencontres couvrent le règne de Louis XVI et la Révolution française (jusqu'à ce qu'elle soit décapitée en 1793, pour cause de girondisme). Avec elle, on côtoie des stars telles que Rousseau, Voltaire ou Louis-Sébastien Mercier, mais aussi de moindres vedettes comme son propre père putatif, l'académicien Lefranc de Pompign