La Ligne. Hérissée de grilles et de projecteurs, entre les Etats-Unis et le Mexique. La frontière. Que tentent de franchir des vagues fragiles de Mexicains et d'AQM. «AQM», c'est l'acronyme qu'emploient les agents de la patrouille frontalière, côté américain, pour «autre que Mexicains». Valentin Pescatore est un de ces agents dont le job consiste à interpeller les clandestins débarqués de la zone de Tijuana. «Quatre voitures de patrouille contre les forces conjuguées de l'histoire et de l'économie.»
Menu fretin. Tout le monde crache sur la «frontalière», accuse ses agents de brutaliser les clandestins. Pourtant, «qui d'autre passe autant de temps avec eux, à leur tenir la main, à porter leurs gosses ?» Pescatore leur file même parfois un billet en douce. Mais ils sont peu nombreux comme lui. Son chef, Garrison, se situerait plutôt à l'autre extrémité, cinglé, cruel, corrompu. N'empêche, les équipes de la frontalière traînent chaque nuit en jeep «sur le champ de bataille de l'absurde», moissonnant les clandestins par grappes : familles entières, travailleurs, paumés, gamins, gangs. «Il n'en était plus à sa première arrestation, mais Pescatore ne parvenait toujours pas à appeler les clandestins des rats.»
Tout ça, c'est le menu fretin, parce que les gros, les «narcos-chics», passent la frontière comme tout le monde, par la route, sans entraves : facile, quand, des deux côtés, c'est «corruptionland». Mais Pesc