Au bac, c'est vrai, il n'a eu qu'une inglorieuse mention «passable», et un joli 1 en langue. Mais il n'avait que 16 ans, et s'il ne pensait pas alors qu'il compterait parmi les plus grands linguistes de son temps, il avait déjà dressé la longue liste des langues qu'il apprendrait, et qu'il apprendra : l'anglais, l'allemand, le russe, l'italien, l'espagnol, mais aussi l'araméen, l'hébreu, le latin, le grec, le celtique, l'iranien, l'indien, le tokharien, l'arménien, le hittite, le sanscrit, le sogdien, ou le haïda et le tlingit, «parlés principalement sur la côte méridionale de l'Alaska». D'Emile Benveniste on publie aujourd'hui les Dernières leçons données au Collège de France : elles viennent comme ajouter trois points de suspension à une œuvre qui non seulement a façonné la linguistique et la sémiologie contemporaines, mais marqué l'ensemble des sciences humaines, sinon la philosophie. Ces points de suspension indiquent une direction ou le chemin que Benveniste se promettait d'explorer encore : le rapport théorique entre les notions de sémiotique et de sémantique, puis celui entre la langue et le système de l'écriture. Mais sont évidemment aussi le signe d'un inachèvement. En 1968-1969, le professeur donne quinze leçons au Collège, reprises ici et transcrites directement des manuscrits (avec l'ajout des notes prises par ses auditeurs Jean-Claude Coquet, Jacqueline Authier-Revuz et Claudine Normand). La leçon d'ouverture du cours de l'année suivante, il la
Critique
Délier la langue
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par Robert Maggiori
publié le 25 avril 2012 à 19h06
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