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Libération
Critique

Ces Nord-coréens qui fichent le camp

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Le journaliste Blaine Harden raconte la vie de Shin In-geun, né et grandi dans le goulag des Kim, avant de s’évader.
publié le 27 avril 2012 à 19h06

Des exécutions, des barbelés et la famine. Longtemps, ce fut le seul quotidien de Shin In-geun. Sans échappatoire. L'enfant ne pouvait guère se raccrocher à autre chose, se souvenir d'un hypothétique passé radieux, s'imaginer dans un autre monde, car il est né au camp 14 du goulag nord-coréen. Ce fut son seul univers pendant vingt-trois ans. «Il en a accepté les valeurs. Il s'y trouvait chez lui», écrit Blaine Harden, le journaliste du Washington Post qui raconte cette histoire ahurissante.

A l'en croire, Shin serait le seul détenu né dans un camp à s'être évadé pour rejoindre la Chine, puis la Corée du Sud et, enfin, la Californie, où il s'est installé en changeant de prénom. Au-delà de l'épopée, ce récit retient l'attention grâce à la profondeur de son témoignage, qui décrit en détail l'un des pires camps de concentration. Dans des pages hallucinées de violence, Harden raconte la terreur du régime concentrationnaire des Kim, au pouvoir depuis près de soixante-dix ans. Et dire que Shin «a mené une vie plutôt confortable», comme l'explique un ex-garde de camp. Shin In-geun est né en 1982 au camp 14, l'un des six sites de Kwan-li-so, le goulag nord-coréen. Créé en 1959 au centre du pays, il «séquestre environ 50 000 prisonniers et couvre 280 km2 avec ses fermes, ses mines et ses usines dispersées le long de vallées encaissées». Coupé du monde, il est autosubsistant, sauf pour le sel, qui vient de l'extérieur. Le père de Shin In-ge