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Libération
Critique

Picasso et Duncan, regards croisés

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Le peintre espagnol sous l’œil du photographe américain.
publié le 27 avril 2012 à 19h46

Le 8 février 1956, David Douglas Duncan (DDD), alors reporter à Life, rencontre Pablo Picasso à Cannes, dans sa villa sans meubles, La Californie. Echange de cadeaux : Duncan lui offre une bague sertie d'un coq ; Picasso, son sourire à l'heure du bain. L'homme le plus photographié du monde apprécie la discrétion de l'Américain, sa bravoure lors de la guerre de Corée. Ils ne se quitteront plus. Ou presque. DDD sera toujours bienvenu auprès du maître, conversant en espagnol, se préoccupant des enfants, partageant leur quotidien, «tel un membre exotique de la famille», souligne Claude Ruiz-Picasso.

Cette longue amitié - dix-sept années - est aujourd’hui le sujet d’un livre émouvant, doublé d’une exposition à Roubaix (1). S’y affrontent deux regards complices. Celui du photographe, bien sûr, et celui de Picasso, conscient de la présence de l’appareil photo mais s’en jouant naturellement. Autre don du ciel, sa photogénie troublante, presque dérangeante. De la même façon qu’il avait demandé autrefois à Brassaï de photographier ses œuvres, Picasso laisse Duncan enregistrer sa vie. C’est-à-dire son travail.

Tout est prétexte à la joie. Un tableau achevé. Une sculpture soudée. La visite du beau Gary Cooper avec un revolver et son chapeau de cow-boy. Paloma et Claude sautant à la corde devant les Baigneurs à la Garoupe. Le rangement des toiles avec Jacqueline Roque. La signature d'une céramique. La chasse aux scorpions. Un déjeuner autour d'un plat de poissons