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Union européenne : un chaos originel

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publié le 4 mai 2012 à 19h06

Dans sa théorie du catastrophisme éclairé, le philosophe Jean-Pierre Dupuy explique que la seule manière d'éviter le pire, c'est de le considérer sérieusement comme inévitable. «Ce n'est pas l'incertitude qui nous retient d'agir, affirme-t-il, c'est l'impossibilité de croire que le pire va arriver.» C'est dans cet état d'esprit que George Soros, habile financier et philanthrope selon les heures, observe notre vieille Europe, dans son dernier essai sur le Chaos financier mondial. L'homme dont les intuitions les plus pessimistes ont fait la fortune compare le destin de l'Union européenne à celui d'une bulle financière : une phase d'essor et de griserie démesurée, suivie d'une phase d'un éclatement aussi fatal qu'inéluctable.

Cette bulle est née avec l'invention de l'Union, «un objet fantastique», «un objet de désir attirant mais irréel», affirme Soros, cette association de nations fondée sur les principes de démocratie, des droits de l'homme et d'un Etat de droit prévalant sur toute nation ou nationalité. Des hommes visionnaires ont ainsi fixé des objectifs limités, établi des échéanciers rigoureux et mobilisé la volonté politique nécessaire à chaque pas, «sachant pertinemment qu'une fois celui-ci accompli, ses carences deviendraient manifestes et appelleraient le suivant».

Pour Soros, ce processus - le «boom» - a culminé avec le traité de Maastricht et l'introduction de l'euro en 2002. Il a été suivi «d'une phase de stagnation qu