Alice Feiring est new-yorkaise, menue, rousse, avec une peau de porcelaine. L'air pas incassable. Mais elle a «beau mesurer un incalculable 1,68 m, peser un énorme 45 kg», ce qu'elle dit «met le feu aux poudres de la controverse et incite des individus bien plus baraqués [qu'elle ne l'est] à vouloir [lui] livrer une bataille rangée». C'est qu'elle aime le vin «naturel» - «rien d'ajouté, rien d'ôté», pour sa version radicale, idéale - par opposition au vin «technologique», corrigé à grand renfort d'additifs et de techniques, que les tenants du naturel estiment superflus et, surtout, corrupteurs.
Cette Alice au pays des magnums, bien réelle celle-là, s'est mise en quête de l'origine des vins «nus», qu'elle qualifie ainsi depuis sa lecture du «saint vinicole», Jules Chauvet. «Le vin doit être nu», disait le savant du Beaujolais qui a inspiré une génération de vignerons (et dont De Gaulle aurait, paraît-il, adoré les vins). Ce «nu, qui évoque à la fois l'exposition, la vulnérabilité et la véracité, semblait tout dire».
Un périple, donc, qui mène Alice des broussailles de l'Ardèche, où un vigneron mi-fou mi-raisin lui fait goûter «une syrah grasse et dépravée qu'il qualifie de belle pute», à la touffeur de l'Espagne, en passant par Morgon, premier maquis de «la résistance au vin industriel», et la Californie, avec ses «jus de hippie». Elle va à la rencontre des vignerons et d