On croit rentrer dans un polar qui se déroulerait sous l’Occupation à l’ombre du vénérable musée de l’Homme à Paris, mais c’est un récit implacable, une recherche de la vérité à travers des dédales d’archives poussiéreuses.
Un soir de 2003, Michael Freund, qui s'est longtemps appelé Michael Legendre, regarde un documentaire sur les Dogons, une première mission de deux femmes ethnologues. L'une est interviewée, Denise Paulme, et on lui demande ce qu'est devenue l'autre, Deborah Lifchitz. Il est surpris par la réponse : «Mais je n'en sais rien, moi. Pourquoi est-ce que vous me demandez ça ?» Denise Paulme pouvait-elle ignorer le sort de sa collègue, juive d'Europe de l'Est, disparue en 1942 ?
Il part à la quête de ce qui est arrivé à Deborah L. et tombe sur le livre de mémoire d'Alice Courouble : Amie des juifs. Catholique, Alice Courouble avait, avec d'autres Français, porté l'étoile jaune par solidarité. Arrêtée, enfermée à la caserne des Tourelles à Paris, elle raconte les scènes de désespoir des femmes juives qui vont être déportées : «Elle attend l'heure. Deborah L.,qui naguère explorait l'Abyssinie, déchire des lettres.» Freund va plonger dans les documents enfouis dans des cartons oubliés. Cherchant Deborah L., il croise l'histoire de son père. Pendant cinquante ans, il a tout ignoré de Julius Abrahamer, juif polonais, mort avant sa naissance, dont il ne portait pas le nom : sa mère avait auparavant fait un mariage blanc avec un Legendre pour fu