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Critique

Les crocs-en-jambe de Claudel

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Le cahier Livres de Libédossier
De Rio à Berne, le monde des ambassades vu par Hélène Hoppenot, diariste au long cours
publié le 23 mai 2012 à 19h07

L’éditrice Claire Paulhan vient encore de mettre la main sur un grand Journal. Rien à voir avec celui de Mireille Havet (1898-1932), qui révélait un écrivain, une liberté, un destin. Hélène Hoppenot (1894-1990) n’est pas une héroïne héroïnomane, et elle n’aime que son époux, le diplomate Henri Hoppenot (1891-1977), qu’elle suit sagement de par le monde, d’ambassade en légation. Ils se sont mariés en 1917, elle commence sa chronique l’année suivante. Henri, désigné par l’initiale «H» tout au long du Journal de sa femme, en a déposé à la Bibliothèque nationale les huit mille pages, dactylographiées par l’auteur elle-même, qui mènent jusqu’à 1972. Marie France Mousli, qui a déjà publié deux de leurs correspondances (celle du couple avec Darius Milhaud et celle d’Henri Hoppenot seul avec Saint-John Perse), a sélectionné la matière de ce premier volume qui va de Rio à Berne, et de 1918 à 1933. A la fin, le vieux rêve d’Hélène Hoppenot est exaucé par le Quai d’Orsay, ils partent pour la Chine.

«Un vrai Journal ne devrait être, selon moi, que fait de points de repère pour aider la mémoire, une sorte de photographie des êtres - à la rigueur de soi-même - saisis dans l'instant, pour qu'ils se représentent à elle dans l'avenir.» Cette remarque d'Hélène Hoppenot, fournie par la préface, définit parfaitement ce qu'on ressent à la lecture. On se rappellera avec la diariste «la bande rouge de ce bateau près du bleu de l'eau et cette barque couverte de fruits» à Valparaiso, le