Paula Spencer n'est plus la femme pleine de bleus qui se cognait dans les portes. Son mari est parti puis il est mort. On pense à lui quand elle se lave les dents, il lui en manque, «tombées sous les coups de pied, quelques-unes». Elle a 48 ans, a cessé de boire depuis quatre mois et cinq jours lorsque le livre commence. Ne pas boire est une occupation continuelle, qui monopolise son énergie, et dure tout le temps du roman : une année à ne pas boire, à avoir envie d'un verre, à ne pas céder. Et à penser à sa famille qui l'observe.
«- Maman dit que tu ne bois plus. - C'est vrai ? - Ouais. - Elle t'a dit ça ? - Non, j'ai entendu qu'elle le disait. - C'est vrai ? - Ouais. - Et à qui elle parlait, mon chou ? - A mon papa.» Le monde de Paula Spencer dispose d'un vocabulaire limité, quand il s'agit de dialoguer avec les enfants, reproches vivants, et les petits-enfants. Pourtant, chacun se fait bien comprendre. Paula est follement fière de sa progéniture et n'attend rien en retour. Nicola a offert à sa mère un réfrigérateur, un grille-pain, un portable. John Paul ne se pique plus. Jack est un ange. Et Leanne une alcoolique. Le bonheur est fragile, Paula veille à ne pas le renverser.
Quatre fois par semaine le matin, et cinq fois le soir, elle fait des ménages. Il lui faudra un jour un compte bancaire. Elle aurait besoin d'un manteau, mais pour mettre où ? «Elle ne sort jamais nulle part. Elle ne va plus à la messe, elle ne va plus au cinéma. Elle n'est jamais a