«Chaque année, sans se lasser, le merveilleux printemps raconte à nouveau l'histoire de la résurrection», affirmait Vladimir Jankélévitch. La figure du printemps, telle une métaphore de la vie, reflète une des facettes de Revivre, dernier ouvrage de Frédéric Worms, professeur de philosophie contemporaine à l'université de Lille-III. D'un côté, «revivre», c'est ressasser le passé, ce «passé qui ne passe pas», l'impossibilité d'oublier les blessures, de devoir les revivre sans cesse. Mais c'est aussi renaître, avoir «le sentiment de l'avenir», agir à nouveau malgré le poids du quotidien. Deux extrêmes en tension. Deux sentiments irréductibles qui déterminent notre vie individuelle et collective.
Worms invite à un inventaire, à une exploration de nos blessures et de nos ressources, à un voyage entre deux pôles, pour une meilleure compréhension de notre époque de manies et de dépressions. Et le voyage est beau, bien que parfois douloureux. «Il y a en moi l'amour des matins, mais il s'endort ou se fatigue, se cache, et lorsque enfin l'air frais me touche, il ressuscite et je m'extasie comme un nouveau venu. Merveille.» On connaît cette impression de renaissance qui nous effleure parfois, l'impression de renouer avec soi, d'être relié au monde, le temps d'un moment. Ce contact nouveau est une surprise, un étonnement heureux, une sensation de première fois, liée à l'oubli.
Cœur. Suffirait-il d'oublier pour revivre ? Worms se réfère