Bien écrire réclame un effort. Ecrire atrocement mal n'est pas plus facile. Aussi est-il naturel que plusieurs prix littéraires aient été créés pour récompenser les pires phrases de romans, en particulier les pires incipit, ou les plus drôles. «Avant d'être renversé par ce putain de bus, je n'avais jamais beaucoup réfléchi, mais maintenant je pense UN MAX» est un merveilleux exemple d'entrée en matière (1), lequel a d'ailleurs failli décrocher le prix Lyttle-Lytton attribué chaque année à la première phrase la plus ahurissante, pour autant qu'elle fasse moins de 200 signes. A ne pas confondre avec le prix Bulwer-Lytton qui, lui, ne fixe aucune limite de longueur aux candidats à l'atrocité incipitielle.
Les grands, les petits et les plus improbables des écrivains sont tous capables de produire des phrases épouvantables. Si bien qu'il suffit de tendre le bras vers une pile de bouquins pour en extraire une pépite. «Ses oreilles, comme toujours lorsqu'elle pénétrait dans l'appartement, se dilataient pour capter le moindre son, aussitôt analysé par son cerveau», écrit Vanessa Gault dans Une famille nucléaire, qui aggrave son cas un peu plus loin : «Laura écoutait de toutes ses forces, et ne recevait que le silence, un silence d'une densité incongrue, qui la rendait hésitante.» Que Vanessa ne nous en veuille pas trop, cela aurait pu tout aussi bien tomber sur, disons, Erckmann-Chatrian.
Beaucoup des phrases récompensées par le prix Lyttle-Lytton n