C'est l'histoire d'un enfant juif d'origine polonaise, bon élève de l'école laïque, qui se convertit à 14 ans pendant la guerre et devint cardinal archevêque de Paris. Né Aron, auquel il ajouta le double prénom de Jean et Marie lors de son baptême, Mgr Lustiger fut l'une des figures religieuses les plus importantes de la fin du XXe siècle, très proche du pape Jean Paul II qui l'éleva à la pourpre cardinalice en 1983.
«Il était à la fois une figure biblique et un intellectuel passionné, résolument moderne», écrit Henri Tincq dans la riche biographie consacrée à ce très atypique prince de l'Eglise décédé en 2007. Atypique, il l'était par sa gouaille et son style direct et imagé. Par son judaïsme assumé aussi et sa volonté de montrer la continuité directe entre sa religion de naissance et son christianisme. «Je suis une provocation vivante qui oblige à s'interroger sur la figure historique du Messie et j'en porte une parcelle par mon histoire», écrivait Mgr Lustiger revendiquant haut et fort cette double identité.
«Figure prophétique, il était habité par une vision tragique de la condition de l'homme sans Dieu, alertant sur les malheurs du monde, imprécateur lucide et énergique, vomissant les tièdes, les pécheurs, les idoles, appelant son prochain à la sainteté et à la conversion», relève l'ancien responsable des affaires religieuses au Monde après l'avoir été au quotidien catholique la Croix. Henri Tin