New York, écrivait le poète Wallace Stevens, est le creuset d'«intérêts infatigables et antagonistes». Ces forces contradictoires, qu'elles soient politiques, sociales ou ethniques, fournissent un formidable matériau romanesque à qui sait les exploiter. Ce fut le cas de Tom Wolfe dans le Bûcher des vanités, et c'est aussi celui de la journaliste Amy Waldman, qui dans son premier roman, Un concours de circonstances, met à profit littéraire les événements qui ont secoué la ville depuis dix ans, pour en tirer un remarquable portrait de l'Amérique post-11 Septembre.
Etincelle. La filiation entre les deux œuvres n'est pas fortuite : d'abord parce qu'un personnage de Concours de circonstances avoue, quelques pages après le début du livre, «qu'il ne se souvenait pas avoir lu un seul roman depuis le Bûcher des vanités», mais aussi parce que Waldman, avec moins de flamboyance mais plus de délicatesse que son prédécesseur, adopte le procédé narratif de son aîné, à savoir celui d'une étincelle bien choisie qui vient enflammer la poudrière new-yorkaise. L'étincelle, c'est celle-ci : deux ans après l'effondrement des tours jumelles (ou autre attentat du genre, puisque les mots World Trade Center ne figurent nulle part dans le livre), un jury sélectionne, dans un concours anonyme pour un projet de mémorial, un architecte musulman. Waldman, qui a couvert les attentats pour le New York Times, en imagine les suite