Le Nil blanc est le nom d'un bout de fleuve, mais aussi celui d'une moto, blanche et indestructible comme Moby Dick, une BMW 500 cc de type R50. Elle est achetée à Munich en mai 1961 par deux étudiants américains de Princeton, John Hopkins et Joe McPhillips. Le premier a lu la Montagne magique et va devenir écrivain. C'est le futur auteur des Carnets de Tanger (1) qui écrit ces Carnets du Nil blanc. Proust est la bible du second. Les deux sont le meilleur de l'élite américaine : jeunesse, naturel, curiosité, culture, sens de l'aventure et de l'observation. Ils reviennent d'un premier voyage au Pérou, où ils ont tenté de devenir planteurs de café plutôt que banquiers à Wall Street.
Désert. John et Joe vont aller à moto jusqu'au Kenya, où un fermier blanc qu'ils ne connaissent pas, et qui se présente comme un ancien de Princeton, les a invités. Chemin faisant, il ne cesse, par lettres, de les abreuver de conseils paternels plus ou moins paranoïaques. En juin, la moto est baptisée à Bologne par un artiste, qui peint «en lettres noires l'inscription "Le Nil Blanc" sur les deux côtés de notre réservoir d'un blanc immaculé». En septembre, «on est repérés à Khartoum. Les gens n'ont jamais vu d'engin semblable. Ceux qui savent lire approuvent le surnom». La moto les protège du désert, de la mort. Elle leur permet de fuir des soldats libyens qui leur tirent dessus et ne fatigue qu'au bout du voyage. Il a commencé en Italie.