Menu
Libération

L’idéal de l’Empire de Prométhée à Epiméthée

Article réservé aux abonnés
par Massimo Cacciari, philosophe et homme politique italien (traduit de l'italien par Michel Valensi)
publié le 30 juin 2012 à 13h22

Philosophe et homme politique italien, Massimo Cacciari fut à deux reprises maire de Venise entre 1993 et 2007. Il vient de faire paraître en français : Le Jésus de Nietzsche, aux Editions de l'éclat. Cet article a paru dans la revue Idem, Ière année, n°3 octobre 2011. Traduit de l'italien par Michel Valensi.

Incontestablement, la période qui va de l’écroulement du « socialisme réel » à la nouvelle « grande crise » que nous traversons actuellement peut être définie véritablement comme une époque. Le terme Epochè indique, en effet, l’arrêt, l’interruption, mais non pas comme s’il s’agissait d’un espace vide, d’un intervalle. Il signifie, au contraire, un resserrement dans le cours du temps, une abréviation extraordinaire, dans laquelle ses caractères essentiels s’expriment comme contractés les uns sur les autres et les uns contre les autres. L’époque, de ce point de vue, n’est donc nullement un « temps long », mais le concentré de ses significations dans un spasme, qui les révèle et peut aussi, en même temps, les dissoudre. De ce même point de vue, on peut définir comme « époque » la grande guerre civile qui a anéanti la centralité politique de l’Europe entre 1914 et 1944: trente ans seulement, à peine plus que « notre » 1989-2011. Dans l’époque, se précipitent évidemment des idées, des facteurs, des contradictions mûries dans le « temps long » – et c’est pourquoi il est impossible de la comprendre de manière isolée. Mais elle assume toutefois une valeur révélatrice et déploie