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Critique

Contes à rebours

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Le cahier Livres de Libédossier
Crus et parodiques, les récits du Napolitain Giambattista Basile n’ont rien d’enfantin
publié le 11 juillet 2012 à 19h07

Il était une fois une jeune fille qui attendait le prince charmant. Il était une fois un roi veuf qui cherchait une gentille épouse pour son fils. S'il a inspiré les frères Grimm ou Charles Perrault, lo Cunto de li cunti, lo trattaniemento de li peccerille («le Conte des contes, le divertissement pour les enfants») de Giambattista Basile n'a pas grand-chose à voir avec la littérature enfantine.

Avec leur vocabulaire cru, leur sens de la parodie et de la dérision, leur verve érotique, leur goût pour les monstres et les situations scabreuses, ces cunti sont l'une des œuvres majeures du XVIIe siècle, même s'ils sont relativement méconnus, y compris en Italie, car écrits en napolitain, une langue aussi riche qu'inventive, que l'unification ravala au rang de dialecte.

Mercenaire de la Sérénissime, courtisan, gouverneur de province, son auteur signa d'une anagramme de son nom (Gian Alesio Abbatutis) ce livre publié en 1634, après sa mort. Italo Calvino le définissait comme le rêve d'un Shakespeare napolitain difforme «obsédé par tout ce qui est effroyable […] où la vulgarité se mêle au sublime».

Ainsi, dans la Gatta cenerentola («la chatte cendrillon»), tout commence avec les malheurs de la princesse Zoza, frappée de malédiction par une vieille femme dont elle s'est moquée. Elle est condamnée à remplir de ses larmes une cruche pour libérer un prince, Tadeo, endormi par une fée. Mais une esclave mauresque aux jambes de sauterelle, Lucia,