Chère Guilaine D., nous ne nous connaissons pas. Vous êtes attachée de presse dans l'édition, fonction pour laquelle nous avons non seulement du respect mais de l'affection. Fin juillet, vous avez envoyé au service Livres de Libération une enveloppe contenant un roman : rien de plus naturel à quelques semaines de la rentrée littéraire. Ce qui l'était moins, c'étaient ces quelques mots manuscrits ajoutés à l'encre violette sur l'enveloppe, juste à côté de l'adresse du journal :
«Premier roman (souligné)
* Judéité
* Trouble bipolaire
* Filiation»
Les critiques littéraires, ces gorets, se donnent rarement la peine d’ouvrir les livres. Ils se soucient encore moins de les lire, ni même de parcourir les communiqués de presse qui les accompagnent. Pis : sous l’avalanche saisonnière, certains n’ouvriraient même plus les paquets. C’est donc dès l’enveloppe qu’il faut capter leur attention. Pas avec un long discours (la Poste n’apprécierait pas), juste avec quelques mots-clés renvoyant à des thèmes jugés percutants, du moins en phase avec les préoccupations de l’époque. Judéité plus syndrome maniaco-dépressif plus transmission, cela forme un cocktail fort intéressant au regard des pathologies contemporaines. Mais d’autres triplets seraient tout aussi alléchants : * Inceste * Boulimie * Lubéron, par exemple. Ou encore : * Bouddhisme * Pédophilie * Psychanalyse.
Jamais auparavant un roman ne nous était parvenu ainsi pré-indexé. Guilaine, vous avez