Ce n'est pas très facile de détester Angot. D'abord ce n'est pas aussi fréquent que ses défenseurs veulent bien le croire. Personne n'a envie de passer pour un cuistre dépourvu de goût parce qu'il trouve Angot idiote, haineuse et totalement dépourvue d'humour, en plus d'avoir été maquée avec un chanteur de variétés sarkozyste. En version haute, ça donne Martine Laval dans Télérama sur l'Inceste, en 1999 : «Le monde ne l'intéresse pas. Elle n'a aucune générosité, pire, aucune distance avec elle-même : elle aime trop sa douleur.» C'est plus difficile ensuite, parce qu'il n'y a jamais de raisons littéraires de ne pas aimer un auteur. A la rigueur, on peut disqualifier quelqu'un en disant qu'il ne sait pas écrire, mais même les plus féroces des contempteurs d'Angot ne se sont jamais risqués à lui dénier la qualité d'«écrivain».
Comme il n'y a pas d'argument littéraire pour ne pas aimer un livre (on se rappelle que d'Alembert trouvait Marivaux complètement nul et qu'il avait tort), il faut bien que ce soit pour des raisons personnelles. Dans son célèbre best-seller de 1757, De la norme du goût, David Hume énonçait ce principe de bon sens : «On peut aimer Ovide à 20 ans et lui préférer Horace à 40. Vainement, alors, tenterions-nous d'entrer dans le sentiment des autres et de nous départir de notre propension naturelle. On choisit ses auteurs comme on le fait des amis, par sympathie d'humeur et de disposition.» Il ne faut donc pas désespé