«L'immobilité, ça dérange le siècle», chantait déjà Léo Ferré dans les années 70. Depuis, tout s'est accéléré, le monde s'est ouvert et interconnecté avec une énergie et une vitesse sidérales. Sans limites, pensait-on. L'étiquette «sans frontières» s'affichant comme le marqueur d'une utopie relookée et d'une idéologie tellurique, celle d'un monde devenu «global». Mais, par un paradoxe naturel, cette mutation radicale a engendré aussi son contraire ou plutôt son double : le retour des murs et des frontières, la quête urgente - comme vitale - de la limite.
C'est ce mouvement entre la force à l'œuvre de l'histoire et le pas lent de la géographie, cette lutte entre l'espace global et le territoire, que raconte et analyse, sous des angles multiples, une trentaine de chercheurs, dans la dernière livraison de la revue Hermès, aux éditions du CNRS. L'onde de choc née de l'effondrement des empires, de la mondialisation et de la mutation technologique a ravivé de vieilles fractures et ouvert de multiples chantiers. Aucun domaine ne semble épargné. «Frontières géopolitiques, murs de communautés fermées, limite entre l'intimité et l'extimité, entre l'individu et les autres, séparation entre aires linguistiques ou culturelles, interfaces biologiques…» égrènent, dans leur introduction, Thierry Paquot et Michel Lussault, pour marquer le retour multiforme, et par la fenêtre, du «fait séparatif».
L'équipe d'Hermès explore les mouvements les plus div