Menu
Libération
Portrait

Jim Harrison, l’ours en sa tanière

Article réservé aux abonnés
Santé chancelante mais toujours jubilant et jouisseur, l’écrivain américain, 74 ans, reçoit chez lui, dans le Montana.
Jim Harrison, ecrivain, Paris, France. 2003. (Photo Jerome Brezillon. Tendance Floue)
publié le 23 octobre 2012 à 19h07

Sous l'arbre. Il est assis sous un saule. Buste droit, jambes écartées, il a enfilé une doudoune bleue électrique sur un tee-shirt fatigué.Il fume une American Spirit, dos à une table de pique-nique qui accueille des verres de vin à n'importe quelle heure de la journée. Son bras qui approche la cigarette de ses lèvres est l'unique mouvement dans ce décor. Jim Harrison se trouve dans le jardin de sa maison du Montana, un coin d'Amérique sauvage au ciel immense. Il scrute la route et les montagnes jaunes à l'horizon. Il attend ses visiteurs. Ici, à l'air libre, il aime raconter les animaux : la dernière attaque d'ours dans la vallée, les serpents à sonnette qui envahissent les herbes hautes derrière chez lui, le chant des corbeaux. Il ne voit que de l'œil droit, souvent fugitif. Il a perdu l'autre à 7 ans, quand une petite fille l'a blessé avec un tesson de bouteille. Depuis, il affectionne les personnages ébréchés, et éméchés. Il écrit : «Je suis un homme de l'aube et du crépuscule», mais cette heure enveloppante de l'après-midi lui va bien. Il n'a pas peigné ses cheveux gris. Son bermuda tombe trop bas sur ses hanches. Cette désinvolture habituelle trahit son plaisir d'être le cul à l'air. A côté de lui, une canne et un déambulateur. L'homme est seul. A 74 ans, c'est l'un des plus grands écrivains américains en vie, traduit dans vingt-cinq langues.

Le studio d'écrivain. C'est une tanière rêvée pour un romancier. Le matin et l'après-m