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Libération
Critique

A double tour

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De la paix de l’âme aux portes blindées, la quête éternelle de la sécurité
publié le 24 octobre 2012 à 20h16

Si un attelage était tiré par Liberté, Justice et Sécurité, il serait d’apparat, et apanage d’un roi - mais il irait de guingois, sinon à hue et à dia. Quand elle veut aller au galop, la liberté laisse se créer des inégalités, que la justice peine à réparer. En absence de sécurité, la liberté est vaine, mais quand la sécurité règne, liberté et justice sont obligées aux restrictions. Des trois valeurs, la sécurité est celle qui a le moins de vertu, ou de noblesse théorique, et ne semble guère posséder de sens moral. Elle est pourtant devenue le thème le plus brûlant de la discussion publique, le spectre qui hante le discours politico-médiatique.

Il n'est quasiment plus de secteurs d'activité qui échappent à l'emprise de la «sécurité» : sécurité des personnes et des propriétés, contrôles, blindages, vigiles, télésurveillance, sécurité urbaine, informatique, alimentaire, sanitaire, ou «sécurité humaine», laquelle, synthétiquement, traduit l'idée que tout individu doit se trouver à l'abri de la peur (freedom from fear), protégé des conflits, de l'arbitraire, de la violence politique ou criminelle, et à l'abri du besoin (freedom from want), protégé de la misère, de la faim, des maladies, des catastrophes naturelles. Mais qu'est exactement la sécurité et comment est-elle devenue un «principe» régulateur des sociétés ?

C'est avec Thomas Hobbes que la politique moderne a inscrit en son «cœur» la question de la sécurité. Mais, à ce propos, essentiels sont les apports