Deux livres de Clément Rosset, un essai et un récit, paraissent en simultané. Avec exactement le même nombre de pages et le même éditeur, ils ont 50 centimes de différence. Prime à la philosophie sur le récit (4,5% plus importante) ou couverture en carton plus cher ? Mystère.
Le sujet de l'un et l'autre est plus ou moins le même : ce qu'on ne voit pas mais qu'on voit cependant. Récit d'un noyé raconte les hallucinations du philosophe tandis qu'il était plongé dans le coma en 2010, sur l'île de Majorque, suite à une noyade aussi involontaire que ratée. Dans son délire, le malade est harcelé par des Néo-Mexicains avec qui ça ne rigole pas côté complot, d'autant qu'il est souvent attaché sur un lit (avec un gros cadenas noir) et interdit de boisson, en particulier l'eau. Parfois, une hôtesse lui propose de réserver un repas : «Je ne dispose que de quinze assiettes de pintade à la sauce crème, naturellement sans pintade ni crème.» Comme Rosset est Rosset, même dans ses visions comateuses, la philosophie de «l'idiotie» le prend. Il découvre par exemple que les Préludes que Chopin termina à Majorque sont des faux, commandés à des tâcherons : «Alfred Cortot lui-même n'y a vu que du feu.» Et, invité à une «nuit brésilienne» à l'hôtel de ville de Paris, il se retrouve dans une expo de toiles qui semblent «le plus souvent des imitations de tableaux de maîtres du passé, effectuées de manière précise mais si mécanique que ces tableaux para