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Critique

Pennequin remue le couteau dans la plèbe

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Le cahier Livres de Libédossier
Un recueil de textes sur la famille et sur la mort par le poète hurlant
publié le 31 octobre 2012 à 19h06

Charles Pennequin dit les choses qui ne se disent pas. Il n'a pas de goût pour les oripeaux bourgeois de la littérature, il préfère le cambouis de la vie. Il est né prolétaire, chose inouïe pour un écrivain français : «nous étions des âmes simples, des petites âmes de pauvres, des petites gens, des gens de petite fortune, des âmes pas granment compliquées, de la petite mitraille, de la misérable bière, du populo très tranquille, pas méchant pour un sou.»

On croit souvent (quand on est de gauche) que le populo ne peut pas exprimer, qu'il n'a pas accès au discours, ne le maîtrise pas suffisamment. S'il n'y a pas de littérature de pauvres, ce serait par incapacité, en quelque sorte, provoquée ou essentielle. Encore un effort si vous voulez vous faire entendre. En réalité, il n'y a pas de gradation, pas de pas à franchir. Le discours pauvre est autre et surtout inaudible, cachez cet assujettissement que nous ne saurions reconnaître : «nous étions les porteurs d'eau de notre destinée.» Si littérature prolétaire il y avait, elle dirait précisément la privation de sujet, serait sans sujet. «nous dérangions l'histoire avec nos paroles inintéressantes», note Pennequin, car ce que le «sans classe» a à dire est informe, ne peut s'insérer dans le grand récit classieux de l'argent et du sexe patrimoniaux.

Dictionnaire. Ce qu'il faut comprendre, c'est que ce n'est ni la langue ni la parole qui sont en cause mais l'expérience elle-même. Ca