Dans les Asturies, la raideur des montagnes rabat le ciel sur un gris océanique. Le vent pousse la lumière, elle vient de loin et elle y reste : violence, puissance, résistance. Ricardo Menéndez Salmón habite ici, à Gijón, ville ouvrière et maritime, depuis sa naissance voilà quarante et un ans. Il fait face à «cet océan mercurial à la fois pansement et blessure, qui dans son intensité paisible et dévorante interdit à quiconque le contemple toute tentation de se sentir durable». Ce genre de paysage peut forger la modestie d'un écrivain, même quand il en est dépourvu.
Couleur. Son huitième roman, le quatrième publié en France, annonce et répète que la lumière est plus ancienne que l'amour. Le retour des idées et l'agencement des images sont une offrande musicale essentielle aux récits de Menéndez Salmón. Par elle, ils pénètrent leur inquiétude en tournant discrètement sur eux-mêmes, comme des vis dans du bois tendre. La lumière est plus ancienne que l'amour, raconte l'histoire de trois artistes : l'Italien Adriano de Robertis, peignant au XIVe siècle une Vierge à barbe que l'Eglise le force à faire disparaître. Le peintre letton et américain Mark Rothko, artiste qui devient, «après Turner qu'il admire, le plus grand libérateur de lumière de l'histoire de la peinture», et s'ouvre les veines comme pour finir dans la couleur. Le peintre russe Vsevolod Semiatin, né à Stalingrad, grandissant pendant la bataille, reçu