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Libération
Critique

Père de claques

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Le best-seller autobiographique de Knausgaard qui enflamma la Norvège sous le titre «Min Kamp»
publié le 14 novembre 2012 à 19h06

Gêné presque, il avoue qu'il n'a jamais vraiment réfléchi aux conséquences de ce qu'il entreprenait avant de se lancer dans ce projet monumental. On est au début de l'année 2008. Karl Ove Knausgaard, 39 ans, vit depuis un an et demi avec sa femme, Linda, et leurs trois enfants, à Malmö en Suède. Le matin du 4 mars 2008, il est 8 heures passées. «Je suis à mon bureau, entouré de livres du sol au plafond, et j'écoute le groupe suédois Dungen en réfléchissant à ce que j'ai écrit et où cela me mène, raconte-il, dans les premières pages de la Mort d'un père. Bientôt j'aurai 40 ans, et après 40 bientôt 50, et après 50 bientôt 60 et après 60 bientôt 70. Et ce sera tout.»

Ce qui le ramène vingt ans en arrière. Il a 16 ans et l'arrogance de celui qui est convaincu d'être destiné à de grandes choses. Pour son père, c'est le début de la déchéance. Cet homme autoritaire, tyrannique, qui terrorise ses deux enfants, abandonne la famille. Il deviendra alcoolique, perdra son travail, sa deuxième famille et mourra. L'auteur a presque 30 ans. C'est la première fois qu'il voit «un corps mort».

Il y a quatre ans, Karl Ove Knausgaard n'était donc qu'un écrivain norvégien parmi d'autres, auteur de deux livres bien reçus dans son pays. Aujourd'hui, il ne peut plus mettre les pieds en Norvège sans que les gens viennent le voir dans la rue ou que les chauffeurs de taxi l'interpellent par son prénom. Car entre-temps, il y a eu la publication de Min Kamp («Mo