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Libération
Critique

Femmes hors d’elles

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Le cahier Livres de Libédossier
Des sociologues sondent les violences au féminin, longtemps impensables
publié le 21 novembre 2012 à 19h02

En désirant qu'Arlette Farge préface cet ouvrage interdisciplinaire de 27 contributions, les sociologues Coline Cardi et Geneviève Pruvost l'inscrivent dans la continuité des travaux novateurs que l'historienne avait dirigés avec Cécile Dauphin en 1997 (De la violence et des femmes, Albin Michel) et soulignent la percée de cette thématique, longtemps impensable, voire tabou. Car penser la violence des femmes perturbe l'ordre des sexes, tout autant qu'il modère la victimisation féminine et desserre la relation dominant/dominée, deux crimes de lèse-majesté féministe. Ces dernières années, une plus grande visibilité de la violence féminine dans l'espace privé (infanticide, violences conjugales et parentales, inceste) et public (délinquance en «bande» de filles, terrorisme, violences de guerre) a émoussé cet interdit tacite. Seule la littérature n'y fut jamais soumise ; de fait, même les institutions chargées de la prise en charge des auteurs de violence de guerre l'ont intégré : leurs plans d'aide et de prévention ne s'adressent qu'aux seuls hommes (Freedman).

Silence. A partir de sources ignorées, les auteurs découvrent les femmes violentes, en des gestes historicisables, et le processus d'occultation qui les a invisibilisées. Certaines ont participé à l'effacement afin d'éviter la répression de comportements, doublement déviants par le recours à la violence d'une part, et par la transgression des normes de genre d'autre part. Telle est bien la fonctio