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La Bourse en chair et en codes

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L’informatisation des marchés racontée par un algorithme endiablé.
(DR)
publié le 13 février 2013 à 19h36

Jerry the Barber était depuis quarante-trois ans le coiffeur du New York Stock Exchange (NYSE). Pendant un demi-siècle il a coupé les cheveux des PDG du NYSE et de milliers de traders avant d'être licencié en 2006. «Il n'avait plus rien à faire là, les algorithmes n'avaient pas de visage et encore moins besoin de coiffeur», lit-on dans 6. Ni de limousine blindée comme le golden boy de Cosmopolis. Dans le film de Cronenberg, les traders humains, spectres détraqués, ont déjà perdu le contrôle, supplantés par les ordinateurs et leur implacable puissance de calcul.

Le narrateur de 6 est bien placé pour le savoir. Lui qui travaille pour le Crédit Suisse à la Bourse de New York. Non dans les clameurs pittoresques du parquet de Wall Street, mais à une cinquantaine de kilomètres de là, à Mahwah, dans un gigantesque hangar glacial où il vit en colocation. Avec d'autres algorithmes de trading à haute fréquence… comme lui (1). Le petit livre retrace l'évolution de la Bourse et son informatisation, depuis la corbeille grouillante du Palais Brongniart où criaient et gesticulaient les agents de change au datacenter réfrigéré d'une banlieue endormie du New Jersey, où les algorithmes de trading à haute fréquence guerroient en silence. Ces automates réalisent 70% des transactions sur les marchés américains et 30% en Europe. Ultimes avatars du technocapitalisme financier, ils répondent aux doux noms de Guerrilla, Shark, Blast, Sumo… Inventées par le