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Portrait

Robert Castel, désaffilié

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Le cahier Livres de Libédossier
Disparition. Révélé par ses travaux sur la folie puis célébré pour ceux sur le salariat, le sociologue est mort mardi, à 79 ans.
publié le 13 mars 2013 à 21h46

Sourcils broussaille, voix rocaille, chaleureuse, Robert Castel livrait sans jamais la moindre emphase ses observations fines, précieuses, sur certaines transformations majeures, et souvent invisibles, de notre monde social. Mort mardi à Paris, il était né dans les faubourgs de Brest soixante-dix-neuf ans plus tôt au sein d'un milieu modeste qui le destina d'abord au métier d'ajusteur. De toute l'histoire de l'Ecole des hautes études en sciences sociales, la noble institution dont il fut, après les années Vincennes, l'un des piliers, il était, sans le moindre doute, le seul directeur d'études titulaire d'un CAP de mécanique. «Miraculé de la République», comme il aimait à se qualifier, à l'instar d'un Pierre Bourdieu de trois ans son aîné et, comme lui, agrégé de philo ayant choisi au début des années 60 de «mal tourner» sociologue, dans l'entourage du maître sorbonnard d'alors, Raymond Aron.

Dans un texte bref et fort, titré «Buchenwald», et publié l'an dernier (in Changements et pensée du changement, éditions La Découverte), Robert Castel a rendu hommage au professeur de mathématiques déporté qui l'encouragea à poursuivre ses études et, du même coup, a «changé sa vie». Ce n'est sans doute pas faire de la sociologie trop sauvage que de rapprocher cette trajectoire sociale ascendante atypique du choix des objets qui auront été les siens, toujours en marge, ou plutôt au cœur des institutions prenant en charge la marge.

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