Quand elle est à quatre mains, l’écriture philosophique, telle que la pratiquèrent, par exemple, Gilles Deleuze et Félix Guattari, a quelque chose d’émouvant. Parce qu’elle suppose complicité, confiance, amitié, et une pensée qui, loin d’être commune, s’élabore en commun à partir justement des débords, des discordances, des «blancs», des différences, et produit «quelque chose» de nouveau, d’imprévu.
Philippe Lacoue-Labarthe, qui n'est plus (2007), et Jean-Luc Nancy n'ont pas seulement écrit des livres ensemble - le Titre de la lettre : une lecture de Lacan (1973), l'Absolu littéraire (1978), le Mythe nazi (1991) -, dirigé ensemble des ouvrages collectifs, organisé des colloques autour de leur ami commun Jacques Derrida, ou fait de «leur» commune université, Strasbourg, un foyer d'intenses échanges intellectuels. Ils ont aussi tenté de penser ce que «commun» veut dire, ce qu'est la «scène» où le dialogue authentique «prend corps» jusqu'à devenir «être-ensemble», ce que «représente», plus largement, une «scène», quand elle est théâtrale ou politique, esthétique ou philosophique.
La Panique politique et Scène, contenant chacun deux courts textes - «la Panique politique» et «Le peuple juif ne rêve pas» (1), «Scène» et «Dialogue sur le dialogue» (2) - permettent de revenir sur la façon dont Lacoue-Labarthe et Nancy surmontent peu à peu les «dissentiments» théoriques pour approcher non un accor